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Compte Rendu Table Ronde ACA du

Thème : L'abaissement de la vitesse sur les routes et ses conséquences

Intervenants :

  • Didier Bollecker, Président de l'Automobile Club Association
  • Christian Gérondeau, Président Délégué à la Mobilité et à l'Environnement (ACA)
  • Christophe Boutin, Adjoint au Délégué Général de l'Association des Sociétés Françaises d'Autoroute (ASFA)
  • Rémy Prud'homme, Professeur économiste
  • Marc Bertrand, Chargé de mission sécurité routière à la FFMC
  • Gilles Mathelié-Guinlet, Secrétaire Général de l'OTRE (Organisation des Transporteurs Routiers Européens)
  • Et le Député Philippe Houillon, membre du CNSR et rapporteur de la mission d'information parlementaire sur la sécurité routière en 2011

Abaisser la vitesse sur les routes françaises. Voilà une mesure qui occupe actuellement le devant de la scène tant cette idée avancée par Manuel Valls durant l'été semble impopulaire. Afin de faire entendre sa voix, l'ACA organisait le 22 octobre une table ronde sur ce thème en présence de nombreux acteurs de la mobilité à commencer par Christian Gérondeau, premier délégué interministériel à la Sécurité Routière et Rémy Prud'homme, professeur d'économie à Paris XII. Etaient également présents, Gilles Mathelié-Guinlet, Secrétaire Général de l'Organisation des Transporteurs Routiers Européens (OTRE), Christophe Boutin, Adjoint au Délégué Général de l'Association des Sociétés Françaises d'Autoroutes (ASFA) ainsi que Marc Bertrand, Chargé de Mission Sécurité Routière à la Fédération Françaises des Motards en Colère (FFMC) et membre du Conseil National de la Sécurité Routière (CNSR).

Pour Didier Bollecker, Président de l'Automobile Club Association l'équation est simple, «il faut aborder la question de la Sécurité Routière d'une tout autre manière.» En effet il considère «qu'affirmer que la réduction de la vitesse n'a pas d'impact sur la baisse de la mortalité est impossible» , mais il rappelle qu'en poussant plus loin la logique, «il n'y aurait alors plus aucun mort sur les routes en supprimant purement et simplement la voiture.»

Une situation pour le moins aberrante pour le président de l'ACA qui a comparé la situation avec le milieu hospitalier. «Il y a aujourd'hui 5 000 personnes qui meurent chaque année dans les hôpitaux des suites d'une infection nosocomiale. Ce n'est pas pour autant que l'on ferme des lits dans ces structures. On forme le personnel, on cherche des solutions ailleurs. Cela devrait en être de même dans l'automobile.»

Rémy Prud'homme, premier participant à prendre la parole est lui revenu sur les possibles conséquences d'une baisse de 10 km/h de la vitesse au volant. D'après ses calculs, cette mesure permettrait de rapporter 1,3 milliard d'euros (800 millions d'euros pour la baisse des accidents et 500 millions pour la réduction de consommation de carburants). Un chiffre bien maigre face aux 5,2 milliards d'euros qu'elle coûterait. Un chiffre correspondant à la perte de temps en voiture et le manque à gagner qui en découle. Pour l'économiste, «la sécurité routière et plus largement la politique de transport ne doit plus être regardée par l'œillet de la répression, mais plus globalement, afin de favoriser l'économie.»

Un chiffre que Christophe Boutin, Adjoint au Délégué Général de l'ASFA, confirmait quelques minutes plus tard. D'après les chiffres communiqués par ce denier, une baisse de la vitesse de 10 % (et non 10 km/h) sur le réseau autoroutier entraînerait une baisse de 2 milliards d'euros du PIB par an. Mais au-delà des conséquences économiques, M. Boutin est également revenu sur l'impact qu'aurait cette mesure sur l'aménagement urbain. En effet, si le gain de temps sur autoroute n'était plus aussi avéré, «ils délaisseraient alors le réseau qui est pourtant celui qui offre la déserte géographique la plus fine du pays et entraînerait la mort de certains territoires» .

Plus de pragmatisme du côté de Christian Gérondeau. Premier homme à avoir occupé les fonctions de Délégué Interministériel à la Sécurité Routière, il fût à l'origine des premières limitations de vitesse en 1973. «Mais aujourd'hui, il en va de l'intérêt général de remettre à plat cette politique qui a 40 ans» explique l'homme nommé par Jacques Chaban-Delmas. Il estime par ailleurs, «qu'une baisse de la vitesse sur autoroute [qui représente 25 % du trafic en France mais «seulement» 143décès], n'aurait aucun impact.» «L'abaissement des vitesses est avant tout une question d'acceptabilité sociale» .

Du côté de Marc Bertrand, de la FFMC, c'est l'incompréhension qui règne. Membre du CNSR, il est notamment revenu sur l'évocation de cette idée lors de cette réunion. En effet, alors qu'il interrogeait les experts à l'origine de cette mesure sur son application aux poids lourds, «ils n'avaient aucune réponse à fournir. Ils ont tout simplement oublié de les prendre en compte» s'indigne-t-il. Pour lui, la baisse de la mortalité n'est pas le résultat d'une politique, mais «un phénomène conjoncturel et généralisé en Europe depuis 40 ans. Un domaine dans lequel les hommes politiques n'ont finalement aucun impact mais dont ils se servent» poursuit-il. Pour Marc Bertrand, c'est l'hypovigilance qui risque de devenir un vrai problème. «La multiplication des aides à la conduite pose aujourd'hui le problème de la responsabilité du conducteur» , explique-t-il notamment avant de conclure «on déculpabilise les utilisateurs avec de nombreuses aides à la conduite avant de les culpabiliser. C'est une catastrophe.»

Un axe repris par M. Bollecker. En effet, il souhaite une «plus grande modularité des vitesses sur les routes françaises,» s'appuyant notamment sur des exemples de pays comme l'Allemagne, la Suède ou l'Autriche. En effet, l'ACA considère aujourd'hui que de trop nombreux accidents surviennent «non pas à cause d'un excès de vitesse mais par une vitesse excessive» [en dessous des limitations de vitesse mais inadaptée].

Présent dans la salle en qualité de spectateur, Philippe Houillon, député UMP du Val d'Oise et membre titulaire du CNSR a accepté d'intervenir dans le débat non sans passion. Pour ce dernier, «la politique actuelle est d'une logique imbécile et traite les réalités faussement,» s'indigne-t-il avant d'ajouter «nous sommes arrivés à un équilibre acceptable en terme de limitation de vitesse. Il faut s'opposer vigoureusement à la baisse de la vitesse sur les routes.» En outre, M. Houillon a également rappelé qu'une baisse de la vitesse au volant entraînerait certes «moins de morts sur les routes mais ne réglerait pas un autre problème, celui de l'alcool.»

Si le débat autour de cette limitation de vitesse a été animé, les participants ont également rappelé quelques mesures qui pourraient être prises en amont de cette décision afin de poursuivre la baisse du nombre de morts sur la route. Première piste évoquée, la réhabilitation du réseau routier français. En effet, tous les participants ont unanimement regretté que l'état des routes se détériore d'année en année sans qu'une politique globale de remise à niveau ne soit effectuée. Gilles Mathelié-Guinlet expliquant que «le réseau secondaire français est tombé en décrépitude.» Marc Bertrand de son côté a expliqué «que la France était le seul pays développé dans lequel aucun audit indépendant sur l'état des routes n'existait.»

Pour étayer cet «abandon du réseau» par les autorités, Christian Gérondeau, s'est lui appuyé sur un fait divers récent. «Tous les jours il y a un drame comme celui que la SNCF a connu à Brétigny [ndlr : un accident de train avait coûté la vie à 7 personnes le 12 juillet en gare de Brétigny-sur-Orge dans l'Essonne]sur les routes. Pourtant nous ne voyons aucune annonce de création d'une commission d'enquête à l'Assemblée Nationale et d'investissement d'un milliard d'euros pour le réseau routier comme cela a été le cas après ce drame sur les rails.»

Présente dans la salle, la représentante de la Ligue de Défense des Conducteurs a indiqué que les automobilistes avaient massivement signé la pétition s'opposant à la baisse des vitesses maximales autorisées.

Afin de conclure cette matinée d'échanges, Didier Bollecker a notamment rappelé la nouvelle campagne de l'ACA sur la «Juste Vitesse» , un pari sur lequel l'association mise beaucoup dans l'optique du débat à venir.

Table ronde ACA 22 octobre 2013

De gauche à droite : Philippe Houillon, Gilles Mathelié-Guinlet, Christophe Boutin, Christian Gérondeau, Didier Bollecker.

Table ronde ACA 22 octobre 2013

De gauche à droite : Gilles Mathelié-Guinlet, Christophe Boutin, Christian Gérondeau, Didier Bollecker, Rémy Prud'homme, Marc Bertrand.

Table ronde ACA 22 octobre 2013

De gauche à droite : Gilles Mathelié-Guinlet, Christophe Boutin, Christian Gérondeau, Didier Bollecker, Rémy Prud'homme.

Table ronde ACA 22 octobre 2013

De gauche à droite : Gilles Mathelié-Guinlet, Christophe Boutin, Christian Gérondeau, Didier Bollecker, Rémy Prud'homme, Marc Bertrand.

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